Le droit reconnait à tout employeur des pouvoirs permettant d’assurer la bonne marche de l’entreprise. Ces pouvoirs découlent essentiellement du droit de propriété.
Le pouvoir de direction prend 2 grandes formes :
- Le pouvoir normatif (ou réglementaire) c’est à dire le pouvoir d’élaborer les règles ;
- Le pouvoir disciplinaire (droit d’édicter des règles et de sanctionner toute personne ne les respectant pas).
Ces pouvoirs sont strictement réglementés et limités par la loi pour éviter les abus.
I) Le pouvoir nominatif de l'employeur : le réglement intérieur (RI)
A) Définition
C’est le droit reconnu au chef d’entreprise d’élaborer des règles s’appliquant à l’ensemble des salariés de l’entreprise et regroupées dans un document (le règlement intérieur).
Ce pouvoir connait des limites. Le RI doit respecter des règles quant à son contenu, le contrôle et sa publicité.
B) Le RI
C’est un document écrit élaboré par l’employeur et regroupant les règles s’appliquant aux salariés de l’entreprise.
1) Elaboration
Il est élaboré par l’employeur et est obligatoire dans les entreprises de plus de 20 salariés.
2) Contenu
Le RI contient exclusivement certaines dispositions (art. L. 122-34 du code du travail) :
Dispositions obligatoires :
- Règles relatives à l’hygiène, sécurité ;
- Règles générales et permanentes relatives à la discipline (conditions de circulation dans et hors de l’établissement, horaires de travail, échelles des fautes et des sanctions) ;
- Dispositions sur la défense des salariés lors des procédures disciplinaires ;
- Dispositions relatives à l’abus d’autorité en matière sexuelle et interdiction du harcèlement moral (protection des victimes et des témoins).
- Aucune autre clause n’est autorisée.
Dispositions interdites :
- Toutes les clauses contraires à la loi, conventions collectives, aux droits et libertés individuelles et collectives (sauf si elles sont justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché), clauses discriminatoires (sexe, religion…).
3) Contôle du RI
L’employeur doit soumettre le RI avant son entrée en vigueur :
- Au comité d’entreprise (ou, à défaut, aux délégués du personnels) et au CHSCT qui rendent un avis seulement consultatif (l’employeur n’est pas obligé de suivre leurs recommandations) ;
- A l’Inspecteur du travail, avec l’avis du comité d’entreprise et du CHSCT) qui peut exiger le retrait ou la modification de certaines dispositions illicites ou contraires à la convention collective.
Après son entrée en vigueur, le RI est soumis au contrôle du juge du conseil de Prud’hommes qui peut écarter une disposition qu’il juge illicite à l’occasion d’un litige individuel.
Publicité du RI
Le RI doit :
- Etre affiché dans l’entreprise dans un endroit accessible et visible pour les salariés actuels et potentiellement embauchés ;
- Etre communiqué au conseil de Prud’hommes.
Il entre en vigueur 1 mois après ces formalités.

II) Le pouvoir disciplinaire de l'employeur
A) Définition
- Le pouvoir disciplinaire est le droit reconnu au chef d’entreprise de sanctionner les salariés pour des fautes commises dans l’exécution de leur travail ;
- Il est règlementé par la loi de 1982. Il est encadré par la loi et connait des limites pour éviter les abus et protéger les salariés.
B) Le pouvoir disciplinaire : fautes et sanctions
Art. L. 122-40 code du travail : « constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prises par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par lui comme fautif… ».
1) Les fautes
La loi ne définit pas la faute.
Il s’agit d’un comportement qui ne correspond pas à l’exécution normale du contrat de travail.
La jurisprudence a qualifié les fautes selon leur gravité : faute légère, faute sérieuse, faute grave, faute lourde.
2) Les sanctions
Toute mesure autre que les observations verbales prises par l’employeur à la suite d’un agissement fautif.
Classement :
- Avertissement écrit (1er degré de sanction) ;
- Blâme (réprobation officielle du comportement d’un salarié) ;
- Mise à pied : suspension du contrat de travail pour une durée limitée pendant laquelle le salarié n’est pas rémunéré ;
Elle peut être purement disciplinaire (pas d’autre sanction) ou conservatoire (c’est-à-dire en attente d’une sanction plus lourde);
- Licenciement pour faute sérieuse, grave ou lourde
(la qualification est importante car les conséquences financières sont différentes selon cette classification).
C) La procédure disciplinaire
L’employeur doit respecter une stricte procédure. L’objectif est la protection du salarié.
Cette procédure est plus ou moins contraignante selon la gravité de la sanction. On différencie sanction légère, qui n’affecte pas la présence, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié, et sanction lourde qui aura une incidence immédiate ou non sur la présence, fonction…du salarié.
2 grandes procédures :
- Les sanctions légères (ex. avertissement) : procédure simplifiée c’est-à-dire simple notification écrite au salarié des griefs retenus contre lui ;
- Les sanctions lourdes (ex. licenciement) : procédures normales :
- Convocation à un entretien préalable par LRAR ;
- La lettre doit indiquer l’objet de la convocation, l’heure, date, lieu de l’entretien et rappeler la possibilité de se faire assister (la sanction envisagée n’a pas être précisée sauf dans le cas du licenciement) ;
- Entretien préalable pendant lequel les 2 parties exposent leurs griefs et arguments. L’employeur indique le motif de la sanction et recueille les explications du salarié. Il peut être assisté d’une personne de son choix appartenant à l’entreprise ;
- Notification de la sanction par LRAR : la sanction et ses motifs doivent être précisés sous peine d’annulation.
D) Le contrôle du juge
Le salarié peut saisir le conseil de Prud’hommes qui contrôle le respect de la procédure, l’existence des faits reprochés, la qualification de la faute et la sanction.
Le juge peut annuler une sanction (sauf licenciement) pour :
- Irrégularité de forme ;
- Sanction injustifiée ;
- Sanction disproportionnée par rapport à la faute (l’employeur peut alors infliger une novelle sanction).
Le juge peut condamner l’employeur à réparer le préjudice subi (ex. indemnités de licenciement abusif, paiement des jours de mise à pied…).
Il peut annuler la sanction sauf en cas de licenciement.

III) Les limites aux pouvoirs de l'employeur
A) Les limites au pouvoir disciplinaire
L’employeur ne peut pas :
- Se servir d’un motif tiré de la vie privée du salarié (sauf s’il est à l’origine d’un trouble caractérisé au sein de l’entreprise) ;
- Prendre des mesures discriminatoires en raison de l’origine, du sexe, de l’appartenance religieuse… du salarié ;
- Imposer une modification du contrat de travail à titre de sanction.
B) Les limites au pouvoir de surveillance
1) La réglementation de la surveillance
L’employeur peut surveiller ses salariés à condition :
- De les avertir des dispositifs de surveillance (caméra, inspecteurs…) ;
- De consulter le comité d’entreprise ;
- De faire une notification à la CNIL (Commission nationale informatique et libertés) ;
- D’utiliser des moyens de surveillance proportionnés au but recherché.
Rq – l’employeur peut interdire au salarié de recevoir et envoyer des e-mails personnels (à condition que cette interdiction ne soit pas absolue). Toutefois, même en cas d’interdiction, l’employeur ne peut ouvrir un fichier intitulé « personnel » car il s’agirait d’une atteinte à la vie privée.
2) La contre-visite médicale
En cas d’arrêt maladie, l’employeur peut demander à un médecin de vérifier que l’arrêt de travail est justifié. Si ce n’est pas le cas, il peut refuser de payer le complément de salaire mais il ne pourra pas prendre de sanction disciplinaire.
C) L’interdiction du harcèlement
1) Le harcèlement sexuel
Définition :
Fait pour tout individu de harceler autrui par des agissements dans le but d’obtenir des faveurs de nature sexuelle à son profit ou au profit d’un tiers.
- Aucun salarié ou candidat à un emploi ne peut être sanctionné s’il a subi ou refusé de subir un harcèlement ou s’il a témoigné des agissements en question ;
- Les salariés victimes ou témoins de harcèlement peuvent saisir le conseil de Prud’hommes pour le faire cesser et demander réparation du préjudice subi ;
- Le salarié doit établir les faits permettant de présumer l’existence du harcèlement. C’est alors à la personne accusée de prouver qu’il n’y a pas harcèlement ;
- Le harcèlement est passible de sanctions disciplinaires dites pénales.
2) Le harcèlement moral
Définition :
Agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte aux droits du salarié au travail et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou de compromettre son avenir professionnel.
- L’auteur peut être l’employeur, un supérieur hiérarchique ou des collègues ;
- Aucun salarié (victime ou témoin) ne peut être sanctionné ou faire l’objet de mesures discriminatoires pour avoir subi ou refuser de subir ces agissements. Toute rupture du contrat qui en résulterait serait nulle ;
- L’employeur doit prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir le harcèlement moral.
- Le salarié accusé de harcèlement moral peut :
- Engager une procédure de médiation
- Saisir le conseil de prud’hommes ;
- Le salarié doit établir les faits permettant de présumer l’existence d’un harcèlement ;
- La personne poursuivie doit prouver que ces agissements ne sont pas du harcèlement ;
- Sanctions disciplinaires et pénales.
